« Notre époque est émotionnelle : elle aime les sensations fortes, les défis délirants, la violence. […] Magnétique et médiatique, la représentation de l’extrême y constitue désormais une véritable culture, un nouveau référent, un but ».1
La violence urbaine est un fait de société dont les images font la Une des journaux et alimente discours et prises de position en tous genres. Photographies prises sur le fait ou vidéos tournées en direct, ces images chocs hantent nos imaginaires et extrapolent nos peurs. On nous projette dans un monde, notre monde, où la fiction se mêle à la réalité.
L’artiste ou le designer pris dans les mailles de la société est le témoin de son époque. Il puise dans le réel des images, des récits, des objets ou traite des notions relatives aux mouvements de fond qui affectent nos sociétés. Usant de décalages, il traduit avec humour, ironie, subversion ou violence les faits de notre contemporanéité.
L’exposition Pièces à conviction présente les oeuvres de plasticiens et de designers qui sont autant de propositions illustrant ce thème de la violence urbaine. Thème abordé dans son sens le plus large : traces de gestes ou d’actes de violence, réponses utopiques pour tenter de se protéger, représentations imagées, symboliques
ou signes qui décrivent ou retranscrivent des sensations, des atmosphères urbaines, noires, agressives, questions des échecs urbanistiques qui engendrent enclavement, exclusion et ghettoïsation, ainsi que visions de lendemains où des forces non maîtrisées transforment l’espace de nos cités.
Les œuvres de l’exposition, ces pièces [à conviction], ne sont pas placées sous scellé, ni conservées par la justice et sont encore moins nécessaire à la recherche de la vérité. Par contre, elles sont présentées au public comme des sortes de « consciences visibles »2. « Pour maintenir un certain niveau de discours critique, et aussi vouloir réellement déconstruire ce que nous sommes tous devenus, refuser ce que nous sommes devenus, et saturer l’espace de points vers lesquels toutes les questions convergent […] une multiplicité de questions, plutôt que la représentation et la projection de l’image d’une société meilleure »3.
Anne-Virginie Diez
Octobre, 2010
1 Paul Ardenne, Extrême, Esthétiques de la limite dépassée, Editions Flammarion, Paris, 2006
2 Krzysztof Wodiczko, Art public, art critique, textes, propos et documents, Ecole nationale supérieure des Beaux-Arts, Paris, 1995, p. 297.
3 Ibid., p. 316.